Se passer de pesticides et pratiquer la permaculture pour produire ses légumes dans son potager, c’est bien. Mais ces pratiques attirent inévitablement les ravageurs de toutes sortes qui peuvent réduire rapidement vos efforts à néants sur certaines cultures. Dans cet article, je vais vous donner quelques conseils et astuces pour réguler les invasions de ravageurs au potager, en essayant de préserver au mieux l’équilibre naturel du jardin.
Certaines techniques de permaculture attirent les ravageurs, comme :
- Le paillage, attire les limaces (entre autres) ;
- Les buttes, avec leur terre meuble et drainée, attirent les petits rongeurs.
La première année cela peut être frustrant, parce que les limaces arrivent plus vite sur les zones de cultures que leurs prédateurs et causent de sérieux ravages.
Mais plutôt que de chercher à tout prix à éliminer les ravageurs, je vous conseille d’agir en prévention pour éviter de trop les attirer. Ensuite, les prédateurs finiront par arriver au jardin et réguleront naturellement ces « ravageurs ».
Voici plusieurs conseils et astuces pour éviter les invasions.
Réguler sans exterminer
Une espèce devient invasive quand elle atteint son pic de population. En population limitée, la grande majorité de ces insectes et animaux ne sont pas nuisibles, au contraire, ils attirent des auxiliaires indispensables à votre jardin.
L’enjeu ici, est donc de réguler leur population en rétablissant un équilibre, pas de les exterminer. Or, cette régulation finit tôt ou tard par se produire, quand les prédateurs ont identifié une réserve de nourriture.
Partager équitablement les richesses
La première étape dans la lutte contre les ravageurs, c’est d’accepter en partie leur présence. Le principe éthique du « partage équitable des richesses » s’applique aussi aux animaux du jardin.
Lorsque vous plantez vos salades, vous devez accepter qu’une partie de votre récolte aille aux animaux qui vivent dans le jardin. Anticipez et plantez toujours plus que vous ne souhaitez récolter et prévoyez des plantons de remplacement.
On ne peut pas pour autant rester les bras croisés devant une invasion !
Les auxiliaires pour lutter contre les limaces
Les grenouilles, les hérissons, les carabes sont d’excellents auxiliaires pour réguler les limaces. Mais si vous élevez des canards, ce sont sans doute les prédateurs les plus fiables pour réduire une invasion de gastéropodes !
Pour attirer au jardin ces auxiliaires, installez :
- Des zones humides pour les grenouilles ;
- Des tas de branches pour les hérissons ;
- Des haies et espaces boisés pour les carabes.
Détourner les limaces !
Encore plus que les salades, les limaces adorent les champignons. Vous pouvez favoriser la prolifération de ces derniers en laissant du bois en cours de décomposition au jardin ou en installant des structures en bois blanc de préférence (escaliers, rondins pour s’asseoir, cadres de buttes, etc.).
Élever des canards
Les canards sont très intéressants dans un projet d’autonomie ! Ils sont rustiques, avec une très bonne résistance au froid et aux maladies (meilleure que celle des poules !), ils sont très autonomes et pondent des œufs…
Mais surtout, les canards sont la stratégie la plus efficace pour réguler la présence des limaces dans un potager en permaculture où l’apport de paillage a tendance à attirer en masse les limaces les premières années.
Il existe plusieurs races de canards mais les coureurs indiens sont les plus adaptés à un jardin en permaculture. Ces canards se tiennent très droits, sont chasseurs, énergiques, agiles et les plus efficaces pour chasser les limaces. Les canes de cette espèce sont aussi de très bonnes pondeuses, avec en moyenne 200 œufs par an, de leurs 6 mois jusqu’à leurs 3 ou 4 ans.
Vous pourriez aussi adopter des kaki Campbell, moins farouches et plus familiers avec l’homme, ou des canards issus de croisements.
Mais les canards comme tous les animaux d’élevage ont de nombreux besoins et représentent une grosse responsabilité. Ils demanderont d’installer des clôtures, une mare, une canardière, et de gérer leur alimentation et leur reproduction.
Les canards ont aussi leurs inconvénients et chez moi, j’ai mis un moment pour trouver une bonne manière de cohabiter avec eux. Ils ne mangent pas tous les végétaux mais font quand même souvent des dégâts dans les cultures, notamment en piétinant des jeunes plantes.
Ce qui a le mieux marché, ça a été d’installer de petites clôtures de 50 cm de haut autour d’une ou plusieurs zones de culture en laissant un passage pour circuler autour. Les canards n’ont pas accès à ces zones sauf en automne-hiver lorsqu’il n’y a plus de cultures dessus. De cette manière, les cultures sont protégées et les limaces sont quand même régulées avant que débutent les plantations.
Prévenir l’invasion des rongeurs
Les rongeurs (mulots, campagnols, etc.) sont attirés par les terres meubles. En prévention, veillez déjà à bien arroser vos buttes et planches de culture et à ne pas les construire trop hautes. En effet, une butte réhaussée a tendance à sécher plus vite et à offrir des galeries pour les rongeurs.
Pour réguler leur présence, vous pouvez utiliser :
- Le ricin, comme répulsif en paillage ;
- Le grillage, sous les zones de culture ;
- Installer des trappes ;
- Adopter un chat.
Autant être honnête, aucune de ces solutions ne sera totalement efficace. Mais patience, après un pic démographique, les populations de rongeurs ont tendance à se réguler d’elles-mêmes d’une année sur l’autre, lorsqu’elles n’ont plus suffisamment à manger ou que leur présence attire des prédateurs.
Les pucerons et les chenilles
Il y a une infinité de pucerons donc certains s’attaquent aux fruitiers, d’autres aux fleurs, d’autres encore aux bourgeons Ceux qui nous posent problème sont généralement ceux qui s’installent sur les fleurs de pois ou de fève en début de saison. Il existe des solutions générales pour limiter leur explosion.
Les pucerons
Le dessous des feuilles peut abriter des pucerons. Ils aspirent la sève des plantes et en rejettent les glucides sur les feuilles qui deviennent collantes. Ce sucre attire les fourmis et les champignons.
Pour lutter contre les pucerons, attirez les syrphes et les coccinelles le plus tôt possible dans l’année. Lorsque vous laissez les pucerons s’installer, les coccinelles adultes vont repérer la zone comme intéressante pour y pondre leurs œufs. Dès qu’elles éclosent, les larves ont environ un mois pour atteindre leur taille adulte et passer au prochain stade de leur mutation. C’est pendant cette période qu’elles sont particulièrement vorace car si une coccinelle adulte mange environ 50 pucerons par jour, une larve, elle, peut en manger jusqu’à 200 !
Pour éviter de devoir sacrifier trop de petits pois ou de fèves au début de la saison, j’ai planté plusieurs sureaux noirs dont raffolent les pucerons au printemps. De cette manière, je n’ai plus d’attaque de pucerons sur mes fabacées et les sureaux abritent à la fois les pucerons et les coccinelles.
Plus vite les prédateurs seront présents, plus vite la régulation sera faite et les invasions empêchées. Je vous conseille aussi de laisser les premiers pucerons qui apparaissent sur vos légumes car si vous les traitez, vous repousserez l’apparition des prédateurs.
Les plants de tabac sécrètent sous leurs feuilles un liquide qui va naturellement engluer les moucherons, les empêchant d’aller s’attaquer à d’autres cultures.
Les chenilles
Mon jardin subit régulièrement les attaques de la Piéride du chou. Un papillon qui pond ses larves sur les feuilles des Brassicacées. Pour lutter contre les invasions de chenilles, commencez par éviter de laisser trop de Brassicacées monter en graines au printemps (choux, radis, etc.), leurs fleurs attirent les premiers papillons dont les chenilles dévoreront les feuilles des choux en été.
Les guêpes mangent les larves de la piéride et les oiseaux les papillons, d’où l’intérêt d’attirer ces auxiliaires au jardin. Les oiseaux mangent aussi les chenilles mais elles sont plus difficiles à repérer parce qu’elles se camouflent sur le feuillage vert des Brassicacées.
S’ils ne suffisent pas, vous pouvez aussi installer des voiles pour protéger les jeunes plantons de Brassicacées.
Conclusion
Cette liste d’astuces et ravageurs est loin d’être exhaustive bien entendu. Il faut toujours se rappeler que, même si l’on essaie de cultiver de la façon la plus naturelle possible, le jardin reste une création anthropique. Les aménagements sont donc nécessaires, même quand on prend appui sur l’environnement pour s’aider dans la régulation. Et il ne faut toujours tenir compte de son contexte, environnement et climat avant de mettre en place une solution. L’observation reste l’un des piliers fondateurs de la permaculture et cela s’applique particulièrement à la thématique de la régulation des ravageurs.
Valentin