Abondance au potager Le paillage

Au mois de mai, les premières grosses chaleurs vont commencer à s’abattre sur le potager. L’occasion parfaite pour parler du paillage, l’une des techniques essentielles de la permaculture ! En effet, en été, un bon paillage sur une planche de culture réduit par 2 voire 4 les besoins d’arrosage ! Mais pailler ses cultures apporte de nombreux avantages supplémentaires comme nourrir et protéger le sol. 

Dans cet article, nous allons faire le tour des bienfaits du paillage et des points clés à prendre en compte lorsque l’on pratique cette technique au potager.

Le paillage, c’est quoi ?

Comme vous le savez, le paillage est l’une des techniques de base de la permaculture. Pailler un sol, cela veut dire ne pas le laisser à nu, comme dans la nature et contrairement aux pratiques de l’agriculture traditionnelle. Mais attention, tous les couvre-sols ne se valent pas. Nous allons voir ensemble les avantages du paillage, les différents matériaux que vous pouvez utiliser (avec leurs avantages et inconvénients), ainsi que quelques astuces et conseils pour vous procurer votre paillage, qui sera l’un de vos alliés les plus précieux au jardin durant la période estivale. 

Les vertus du paillage

Couvrir le sol

Le premier objectif du paillage, c’est de couvrir le sol, car cela a de nombreux avantages :

  1. En paillant son sol, on limite grandement l’évaporation de l’eau du sol. Grâce au paillage, l’humidité du sol est conservée et cela l’empêche de sécher ;
  2. L’obscurité créée par le paillage évite la germination des plantes indésirables. Le paillage réduit donc grandement le temps de désherbage ;
  3. Enfin, le paillage protège le sol des éléments naturels comme le vent (qui érode le sol) ou le gel en hiver. 

Enrichir le sol

Cependant, le paillage a un deuxième objectif central, c’est enrichir notre sol, notamment en nourrissant les micro-organismes du sol. Ces derniers sont les meilleurs amis du jardinier car ils aèrent, fertilisent et travaillent notre sol potager à notre place grâce à leur activité. C’est pourquoi il est plus intéressant que notre paillage soit composé de matières organiques équilibrées plutôt que de bâches en plastique qui n’ont que la propriété d’obscurcir le sol et d’empêcher l’évaporation de l’eau. Car pour atteindre le meilleur résultat possible, il est important de respecter quelques règles importantes dans la composition de notre paillage.

Paillage ou « mulch »

En français, on parle de « paillage », mais en réalité, le mot « mulch » est plus adapté, puisqu’on ne parle pas uniquement de paille mais d’un mélange de matières organiques qui, bien équilibré, protège le sol puis se décompose pour l’enrichir.

La composition du paillage

De quoi peut être composé un paillage de matières organiques au jardin ? 

Traditionnellement, on les sépare en deux catégories : 

  • Les matières plutôt carbonées (C), des matériaux organiques durs, secs et fibreux (tiges de roseaux, branchages fins, BRF (bois raméal fragmenté), feuilles mortes, etc.) ; 
  • Les matières plutôt azotées (N), des matériaux organiques mous, verts et humides (tontes de la pelouse, déchets de légumes et fruits, fumiers d’animaux, etc.). 

Un bon équilibre entre les deux assure un apport optimal pour le sol et permet une bonne décomposition des matériaux. Si vous souhaitez plus de détails sur le rapport C/N, vous pouvez vous référer à mon article « un sol vivant, c’est quoi ? » dans le numéro 21 du Cercle APS. Pour vous simplifier la tâche, vous pouvez compter une part de matériaux sec pour une part de matériaux frais. Restez cependant attentif à vos plantes et si vous voyez qu’elles peinent à pousser vous pouvez compléter le manque d’azote avec un arrosage au purin d’ortie. 



Le bon calcul

Pour rappel, on estime que pour un mulch équilibré, il faut 25 à 30 fois plus de carbone que d’azote. Ça peut paraître impressionnant mais ce n’est pas difficile à atteindre parce que même dans les matériaux dits « riches en azote », la proportion de carbone est supérieure à celle de l’azote.

L’épaisseur du paillage

Il dépend surtout de la période de l’année. Il y a une distinction à faire entre les périodes de cultures et celles de repos.

Quand le jardin est au repos

En automne, pour mettre le jardin au repos, ça vaut vraiment la peine de mettre une couche épaisse d’environ 30 cm de paillage avec les matériaux qui ont poussé sur place : biomasse, feuilles mortes, fanes de légumes, broussailles. D’où l’intérêt de laisser pousser les plantes qui fourniront de la biomasse au jardin.

Donc à l’automne, je coupe les légumes au pied, je laisse les racines dans le sol et je dépose les fanes sur place. 

Commencez le paillage avec les matériaux les plus rigides, placés directement au contact de la terre pour ménager des poches d’air et finissez par recouvrir avec les matériaux les plus fins. Non seulement ces poches isolent du froid et du gel, mais elles pourraient servir de refuges pour la nidification des insectes voire des crapauds dont on connaît le goût pour les limaces. 

Couvrir vos zones de culture dès l’automne simplifie aussi le désherbage. Je coupe seulement les grandes pousses à l’automne et je laisse les petites pousses dépérir sous le paillage. 

Si votre paillage de feuilles mortes menace de s’envoler, arrosez-le pour l’alourdir et coller les feuilles entre elles, ou recouvrez-le avec quelques branchages.

zones de culture dès l’automne

Au moment de planter

Au moment de semer ou de planter, tout dépend de l’épaisseur de votre paillage, vous pouvez : 

  • Diminuer l’épaisseur du paillage (environ 10 cm) et planter directement au travers, voire semer de grosses graines (assurez-vous juste de bien mettre la graine en pleine terre et de ne pas la perdre dans le paillage) ; 
  • Découvrir entièrement la zone de culture pour les petites graines et les petits semis (ex : carotte) puis la recouvrir en début d’été, une fois les plants développés. 

En cours de culture

Plus les plantes sont grandes, plus elles tolèrent un paillage épais. Si vous avez de quoi couvrir votre sol, n’hésitez pas à le faire. Pour un mulch en cours de culture, j’utilise souvent du foin et des feuilles mortes de fruitiers, avec un rapport carbone/azote équilibré

Sinon le mélange paille et herbe de tonte fraîche est très pratique en été car on trouve facilement ces deux matériaux, mais attention aux proportions si vous utilisez de la paille de blé ! 

Les limaces

Le gros inconvénient du paillage, c’est qu’il est un nid à limaces… Si vous êtes concerné par le problème, vous pouvez quand même utiliser cette technique avec quelques ajustements. 

Deux à trois semaines avant de planter ou semer, retirez toute la couverture de paillage et mettez-la de côté ou au compost. Juste avant de planter ou de semer, sarclez les 2 premiers centimètres du sol pour enlever les jeunes mauvaises herbes qui auraient germé. 

Le temps que les jeunes plants se développent et soient moins vulnérables aux attaques, ne remettez pas de paillage. 

Dès que les plants sont bien montés (30 à 40 cm) et que l’été arrive, repaillez votre zone de culture en fonction de la taille des plantes et toujours en respectant l’équilibre carbone/azote. Vous bénéficierez à nouveau des avantages du paillage, contre les mauvaises herbes et surtout, pour diminuer les arrosages. 

En automne, couvrez le sol abondamment pour l’hiver.

limace sur salade

Où trouver les matériaux ?

Pour tout paillage, privilégiez les matériaux que vous avez à disposition (biomasse du jardin, tontes de gazon, feuilles mortes, etc.), c’est l’idéal dans une démarche de permaculture et d’autonomie. N’hésitez pas à demander à vos voisins qui voudraient se débarrasser de leurs déchets verts, aux paysans des environs s’ils vendent ou donnent du foin, il n’est généralement pas traité.

matériaux dans le jardin

Si vous achetez de la paille à l’extérieur, assurez-vous qu’elle soit de bonne qualité et non-traitée, idem pour les matières azotées, même si on en trouve plus facilement. 

Il peut également y avoir un problème avec les graines contenues dans les végétaux que vous utilisez en paillage. Certaines graminée (paille et foin, par exemple) contiennent pas mal de graines qui vont certainement germer dans votre mulch. 

Jusqu’ici chez moi j’ai réussi à composer avec ce phénomène surtout car je peux laisser le sol couvert sur la totalité de l’année donc les graines n’ont donc pas assez de lumière pour germer.

Le problème se pose plus si vous laissez la terre à nu, mais garder aussi en tête que le sol contient déjà de nombreuses graines prêtes à germer s’il se retrouve découvert. 

Dans la mesure du possible, choisissez des matériaux qui n’ont pas ou peu de graines. 

Les plantes pour la biomasse

Au jardin, il y a plusieurs plantes que je cultive pour leur biomasse. Evidement elles sont souvent aussi utiles pour d’autre raison ; attirer les auxiliaires, repousser des ravageurs ou encore aérer le sol.

Les plantes annuelles

Elles sont intéressantes car elles n’auront pas besoin d’occuper la même place l’année suivante, vous pouvez donc les planter entre vos légumes sur les planches de culture.  Dans cette catégorie, j’utilise souvent : 

  • L’amarante ; 
  • Le tournesol ; 
  • Le ricin ; 
  • Le chénopode ; 
  • Le souci ; 
  • La grande tagète. 

Elles ont l’avantage de croître très rapidement et donc de créer beaucoup de matière en une seule saison.

Les plantes vivaces

Elles permettent de fournir plus de biomasse encore car une fois passé le cap des deux premières années après la plantation, elles vont fournir régulièrement des quantités abondantes de matière. De plus, elles pousseront sans plus d’action de votre part, une fois installées. 

En revanche, il faudra réfléchir avant de les planter car une fois en place, elles ne pourront pas forcément être déplacées. Dans cette catégorie, au jardin, il y a :

  • Du roseau de chine (miscanthus) ; 
  • De l’armoise ; 
  • De la vendangeuse (aster ericoïd) ; 
  • De la consoude.

Les plantes « invasives »

Finalement, il y a aussi des plantes qui s’installent spontanément et à qui je laisse une place au jardin car elles peuvent justement me rendre service pour le paillage, entre autres. 

  • L’ortie ; 
  • L’onagre ; 
  • La molène ; 
  • La solidage. 

Ces dernières sont mes préférées car elles ne nécessitent aucune action de ma part si ce n’est la cueillette. Cependant, il faut rester vigilant quant à leur caractère invasif. 

Concernant le bois broyé et les feuilles, j’ai aussi planté beaucoup d’arbres et arbustes au jardin de manière à bénéficier de ces deux ressources au maximum, directement sur place.

Évitez l’utilisation des conifères !

Les aiguilles de pin, mélèze, etc. et les copeaux de bois de conifères acidifient le sol, évitez donc de les utiliser au jardin. Les légumes préfèrent un sol au pH neutre.

 

Valentin

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